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Samuel Grzybowski : 6 ans de ma vie pour « Coexister »

Publié par jeunescathos le 8 octobre 2015 - A la Une, Interreligieux, Jeune du mois, Vie de l'Eglise

2-jeune du moisTous les mois, retrouvez le portrait d’un(e) jeune catholique engagé(e). Ils nous partagent leurs combats, leurs espérances, leurs doutes, ce qui les fait avancer et comment la foi fait bouger leur quotidien.

 

Aujourd’hui, place à Samuel Grzybowski, qui a créé en 2009, à 16 ans, l’association Coexister, elle compte actuellement plus de 1 800 membres.

 

Samuel tu es le fondateur de l’Association Coexister, que tu présides depuis 2009. Le 9 octobre a lieu l’Assemblée générale de Coexister, à l’occasion de laquelle tu quitteras cette fonction.

Crédits : Corinne SIMON/CIRIC.

Crédits : Corinne SIMON/CIRIC.

Je quitte la présidence de Coexister après avoir été président pendant deux mandats de trois ans. C’est important de permettre un changement régulier de nos cadres, de nos visages, de nos expériences. Il n’y a rien de plus dangereux qu’une association qui se confond avec une personne.

Par ailleurs, en tant qu’initiateur de Coexister, je mettrais clairement en danger notre aventure collective si à force de m’attacher à la structure – même en croissance – je devais provoquer chez mes camarades une envie de me voir partir. Il me paraît très important de quitter la gouvernance du mouvement à un moment où j’ai d’excellentes relations avec chacun de nos membres.

Enfin, j’ai commencé la présidence de Coexister à 16 ans, c’est toute une partie de ma jeunesse à laquelle j’ai consacré cet engagement qui m’a rendu très heureux. Mais j’ai beaucoup donné et aujourd’hui, à 23 ans, j’ai besoin de me recentrer sur ma vie personnelle.

Coexister a aujourd’hui 7 salariés et 35 volontaires en service civique. Nos Assises de juin 2015 m’ont convaincu que nous recélons de bonnes volontés et de belles personnalités capables d’assurer un grand avenir à Coexister.

Après mon départ, je pense que je vais rester environ 4 ou 5 ans présent sur les formations pour continuer à délivrer un message. Je vais aussi assurer la présidence symbolique d’un conseil de surveillance au niveau européen qui coordonnera les associations Coexister de France, de Belgique, de Suisse et d’Angleterre, avec trois autres anciens.

Pourquoi avoir décidé de te « lancer » dans cette aventure associative, à un si jeune âge ?

Groupe Coexister

Coexister en 2012

Je n’ai pas vraiment « décidé » de lancer Coexister. Je veux dire, ça n’a jamais été le fruit d’un discernement ou d’une réflexion en amont. J’ai plutôt le sentiment d’avoir répondu à un appel. Il se trouve que le 14 janvier 2009, pendant une manifestation pro-paix vis à vis du conflit israélo-palestinien, j’ai pu lancer un appel aux jeunes pour qu’ils me rejoignent et que nous organisions un don du sang ensemble. On était 11, il y avait deux juives, trois musulmans, cinq chrétiens (dont moi), un agnostique. Au moment de faire cet appel, on m’a donné la parole. J’ai improvisé. En descendant de la scène pourtant j’étais conscient que quelque chose de « logique », de « cohérent » venait de se produire.

En 2012, la première fois que j’ai suivi une retraite sur le modèle des Exercices Spirituels de Saint Ignace pendant 8 jours, j’ai compris toutes les racines de mon engagement. J’avais grandi dans une école primaire interculturelle, le jamboree mondial du scoutisme en 2007 m’avait fait découvrir la force de l’unité dans la diversité, un voyage Auschwitz en 2008 m’avait convaincu du rôle de chacun pour la paix et le vivre-ensemble.

J’aimais l’idée de créer du lien, au service de l’harmonie, dans la société. C’est à la portée de chacun de nous. On peut créer des ponts en bas de nos portes, mais aussi entre les autres.

Qu’est-ce que cet engagement associatif t’a apporté ? Et quels sont les « résultats » les plus importants, dont tu es le plus fier, autour de toi ?

La liste serait trop longue pour vous dire ce que Coexister m’a apporté ! J’ai envie de dire en éclatant de rire : j’avais 16 ans au début ! J’ai tout appris pendant cette période : l’organisation, la rigueur, la régularité, le travail en équipe, la communication non violente, le dialogue, l’écoute, les épreuves à traverser.

J’ai compris en rentrant du tour du monde qu’aucun de « nos gros résultats » n’avait de la valeur finalement. La seule valeur, la seule chose dont je suis fier à ce moment-là de ma vie, c’est d’avoir créé des liens entre des jeunes de toutes les convictions religieuses. Tout le reste est un prétexte. Rien de ce que nous avons entrepris en dialogue, en solidarité, en sensibilisation, en formation ne restera. La seule chose qui restera c’est l’amitié et la proximité des uns avec les autres. Je crois qu’une action Coexister est une action réussie si elle est simple, concrète et vraie. Chaque lien tissé est un succès. Quand je regarde nos 100 représentants de groupes locaux réunis à nos Assises Nationales du 5 au 7 juin dernier, je vois des rires, des amitiés, des complicités. C’est ça ma fierté.

Tu es catholique, de quelle manière ta foi anime vos engagements ? Le fait de rencontrer beaucoup de personnes de religions différentes ou athées, a-t-il provoqué des remises en question ?

Lors de l'Interfaith Tour, à Jérusalem

Lors de l’Interfaith Tour, à Jérusalem

La remise en question a été violente oui. Surtout pendant le tour du monde. La France, ses terroirs et son histoire étaient restés pour moi un cadre assez favorable pour tenir les racines de mon identité bien plantées en terre. Une fois arrivé en Asie j’étais perdu. Je n’avais plus ce terreau. J’ai paniqué.

Pendant le tour du monde, j’ai redécouvert le chapelet. Nous étions au Liban, après une journée chargée de peurs dans une ville sous occupation militaire. Le soir j’ai prié le chapelet. Il est devenu mon compagnon toute l’année. Mes camarades se faisaient discrets quand ils voyaient que je le récitais. Pour moi le chapelet c’est la prière du pauvre, c’est la prière de celui qui n’a plus rien à dire et qui ne sait plus quoi penser. Depuis que je suis rentré en France je ne le prie plus vraiment, excepté en retraite.

Sur cette route de mon engagement à Coexister, beaucoup d’événements et de rencontres m’ont aidé à découvrir et mieux rencontrer le Christ. J’ai ré-appris à prier, régulièrement, patiemment. J’ai redécouvert l’importance de la retraite tous les ans. J’ai creusé la spécificité de l’Évangile par rapport aux autres dites « révélations. » J’ai lu et étudié Vatican II pour présenter l’Église à mes camarades.

Ma foi a évolué dans le sens d’une proximité grandissante oui. Jésus devient chaque jour un peu plus un ami. Je dirai que la foi a été le moteur de mon engagement, l’huile dans les rouages, mais pas la cause. Le Christ était partout sur le chemin, mais ce n’était pas mon intention à l’origine que de le rencontrer en créant Coexister. Je crois que ce désir de rencontre avec lui est le propre de toute ma vie, elle dépasse bien largement en fait un engagement associatif, qui même s’il prend un temps considérable, n’est pas le tout de mon existence.

Aujourd’hui j’arrête cette forme d’engagement, mais la foi continue et elle grandit.

Ma très grande joie à cet instant, c’est que je commence une préparation au mariage, je me sens tout petit vis-à-vis de ce choix. Ça me paraît carrément plus balaise que de fonder une association, c’est une autre dimension. J’ai envie de me donner du temps pour ça.

Quel message aimerais-tu faire passer à de jeunes cathos d’aujourd’hui, déjà engagés dans des mouvements, ou bien réticents, un peu « tièdes » ?

Crédits : Corinne SIMON/CIRIC.

Crédits : Corinne SIMON/CIRIC.

Je pense que le monde a besoin de jeunes convaincus. Je distinguerai vraiment la conviction de la certitude. Nous n’avons pas besoin justement de jeunes sûrs ou certains. Ils donneraient l’impression de l’arrogance ou du mépris. Il faut écouter le vent à l’intérieur, celui qui souffle sur notre petite flamme et tenir la flamme allumée. Les convictions sont extrêmement différentes, mais pour les jeunes cathos nous avons tous une conviction en commun : celle que le Christ est ressuscité !

Je voudrais vraiment encourager les jeunes de ma génération ou déjà de la génération suivante à entretenir dans le même temps leurs racines et leurs branches. Des racines profondes plantées dans la terre de l’Évangile, arrosés par la prière, entretenus par le discernement, approfondies par des choix ! Et puis des branches tournées vers l’autre, vers la rencontre, vers l’audace de l’altérité. Il ne faut pas avoir peur. Les vrais troncs tiennent debout grâce aux liens entre les racines et les branches.

Je sais que ma génération est particulièrement soucieuse de la place de l’islam et des musulmans dans le monde et la France d’aujourd’hui. Je comprends cette inquiétude. J’ai vraiment envie de leur dire de ne jamais se fier à ce qu’ils entendent ou ce qu’ils lisent. L’Église a bien compris comment un texte révélé ne parle pas de lui-même. Il parle au travers de la foi des croyants qui le suivent. Alors pour comprendre l’islam et les musulmans, cessons des parler des autres mais parlons aux autres. Parlons aux musulmans eux-mêmes. Prenons le temps de l’interrogation fraternelle. N’oublions pas non plus les étapes. Souvent une première rencontre est trop prématurée pour aborder les questions qui fâchent, construisons d’abord les bases communes avant de regarder lucidement ce qui nous sépare.

 

La qualité que tu préfères chez les autres : la bienveillance

Ce que tu détestes par-dessus tout : la malveillance

Tes héros dans la vie réelle : Christian Delorme

Ton verset de Bible préféré : “M’aimes-tu ?”

Une rencontre qui t’a touché : Hasan, un Bosniaque qui a vu sa famille mourir à Srebrenica et qui m’a dit “Je n’ai pas assez de place dans mon coeur pour aimer Dieu et haïr les autres”.

Ton livre phare : Les identités meurtrières, de Amin Maalouf

Un film qui t’a marqué : Gandhi

Dieu pour toi, c’est : un ami

Que lui diras-tu quand tu le verras de face : J’espère le voir en face !

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Commentaires

A toi la parole.

  1. Thadarth says: octobre 8, 2015

    Merci Samuel de ce témoignage vibrant de foi et d’amour.
    Cela fait du bien d’entendre un jeune parler comme vous le faites
    avec humilité sincérité et une conviction fraternelle à l’égard de tous
    C’est le message de Paix qu’avec Jésus — oui vraiment un ami– vous
    souhaitez partager.
    Le chapelet est une poésie que je récite, sans me lasser , en face de Notre Dame.
    Il me remplit de bonheur , de Paix et me relie à Jésus
    Merci Samuel .

  2. Soeur Marie says: janvier 14, 2017

    Dans le même thème (interreligieux) et à destination des jeunes Catholiques qui veulent découvrir le judaïsme, voici une proposition nouvelle : https://notresourcejuive.wordpress.com/

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