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Le pape, la Cop21 et moi : sa ‘grande gueule’ et mes petits bras #3  

Publié par jeunescathos le 9 mars 2016 - A la Une, Ecologie

visuel rubrique societeTous les mois, retrouvez un sujet de société ou d’actualité, traité sous l’angle de la Doctrine sociale de l’Eglise, sous l’oeil bienveillant et plein de finesse de Martin de Lalaubie, journaliste au Ceras et réalisateur de Jeunes et engagés.

 

« La mise en pratique de l’accord de Paris demandera un engagement collectif et un généreux dévouement de la part de chacun. » Pape François, le 13 décembre 2015

Personne n’échappe aux paroles chocs du pape François. Je les adore ! Mais comment les traduire en actes ? S’il le dit, c’est que c’est possible. On réfléchit puis on retrousse nos manches !

pape-francois-place-saint-pierre-3François a prononcé cette phrase au lendemain de la clôture du sommet, lors de sa traditionnelle prise de parole depuis la fenêtre du palais apostolique, comme chaque dimanche. Il a insisté « en souhaitant que soit garantie une particulière attention aux populations les plus vulnérables, j’exhorte l’entière communauté internationale à poursuivre avec sollicitude le chemin entrepris, en signe d’une solidarité qui devienne toujours plus active. » (voir ici)

J’avoue que je m’attendais à ce que le pape fasse plus qu’une déclaration, qu’il mette un coup de pied dans la fourmilière en disant aux chefs d’Etat qu’il fallait se bouger face à l’urgence et arrêter de regarder ses intérêts nationaux ! Bon, ça n’a pas été tout à fait ça.

Mais du coup je me pose une question, comment allier « un engagement collectif et un généreux dévouement de la part de chacun » ?

Du point de vue des ONG catholiques

Une phrase entendue plusieurs fois, la Cop terminée, était : « En comparaison de ce qu’il aurait pu être, l’accord est un miracle. En comparaison de ce qu’il aurait dû être, c’est un désastre. » (par exemple) Extraite du quotidien britannique, le Guardian (ici), elle reflète bien l’état d’esprit de la plupart des ONG qui ont mis beaucoup d’énergie à faire pression sur les négociateurs. Le CCFD – Terre solidaire est de celles-là. L’ONG catholique pointe « un accord historique mais qui ne répond pas à tous les défis. » (voir ici)

L’enjeu n’est pas ici de juger de l’accord. Mais plutôt de se dire que « le risque est de considérer la question ‘réglée’ après la Cop. » C’est un peu ce que nous rappelle le pape quand il « exhorte l’entière communauté internationale à poursuivre avec sollicitude le chemin entrepris. » Effectivement, on a du boulot et la communauté internationale aussi !

Quel engagement collectif et politique ?

Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques - COP21 (Paris, Le Bourget)

Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques – COP21 (Paris, Le Bourget)

Si la communauté internationale doit poursuive les efforts, que fait la France, pays hôte de cette fameuse Cop ? On peut s’étonner quand on voit que depuis la clôture de la conférence, le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes s’est accéléré. Encourager le trafic aérien, n’est-ce pas à l’opposé de la lutte contre le dérèglement climatique ? D’un côté le gouvernement s’enthousiasme du succès de la Cop et de l’autre, sous prétexte d’emplois et de croissance, il défend un projet fortement émetteur en gaz à effet de serre. Quand je vois ça, je pense au paragraphe 194 de l’encyclique Laudato si’. Celui où le pape dénonce les « justes milieux. » « Il ne suffit pas de concilier, en un juste milieu, la protection de la nature et le profit financier, ou la préservation de l’environnement et le progrès. Sur ces questions, les justes milieux retardent seulement un peu l’effondrement. » Et apparemment, je ne suis pas le seul. Des chrétiens de Loire-Atlantique ont lancé un appel à rediscuter le projet d’aéroport à la lumière de Laudato si’.

Mais l’incohérence de quelques-uns ne doit pas nous faire désespérer du politique. Rappelons-nous qu’« on peut devenir saint en faisant de la politique. » Tout dépend de comment on s’y prend. « La grandeur politique se révèle quand, dans les moments difficiles, on œuvre pour les grands principes et en pensant au bien commun à long terme. Il est très difficile pour le pouvoir politique d’assumer ce devoir dans un projet de Nation. » affirme le pape.

Les initiatives individuelles citoyennes

Mais tout ça ne résout pas notre équation entre « un engagement collectif et un généreux dévouement de la part de chacun » ! C’est exactement la question que pose Antonin Pottier, docteur en économie de l’environnement, dans son article « Quelle demande pour les politiques climatiques ? » où il analyse la tension entre le défi climatique qui appelle des réponses collectives et une société marquée par l’individualisme. En questionnant deux obstacles à une adhésion collective à la politique climatique, il tire plusieurs enseignements. « Le premier enseignement semble être de laisser une grande latitude d’initiatives aux individus. Même si l’on peut déplorer la montée de l’individualisme, la transition écologique ne peut aller frontalement contre cette tendance. »

Comment faire de mon pouvoir d’achat un pouvoir de changement ?

Alors, puisqu’il est (en partie) conseillé de laisser vivre les initiatives personnelles, vers où orienter les nôtres ? Ce n’est pas une fierté, mais dans cette société, je ne peux m’empêcher d’être un consommateur. Alors autant être un consommateur intelligent et faire de mon pouvoir d’achat un pouvoir de changement ! Aucun domaine n’est épargné :

  • L’alimentation : Notre assiette, c’est 1/3 des émissions de gaz à effet de serre. On nous le dit ici et . Il n’est jamais trop tard pour commencer un Carême pour la terre ;-). Et toute l’année on pourra donner « Un coup de fourchette pour le climat ».
  • Transport : Le printemps ne va pas tarder, alors je regonfle mes pneus et je vais au boulot à vélo ! En plus désormais, les cyclistes peuvent recevoir des indemnités kilométriques. Et c’est cumulables avec les indemnités transports en commun, donc aucun soucis en cas de pluie !
  • Energie : Je chauffe, j’éclaire, je recharge… mais d’où vient mon électricité ? Il est aujourd’hui tout a fait possible d’avoir une électricité 100% renouvelable.
  • Argent : Que fait mon banquier de mon argent ? Les Amis de la terre ont développé un guide afin de savoir si notre banque est « climaticide » ou non. Vous vous souvenez ? On en parlait là.
  • Vie quotidienne : Et pour tous les petits gestes quotidiens, il y a l’appli 90jours. C’est un assistant personnel de transition écolo qui vous accompagne de défi en défi, un peu comme un coach sportif !

L’enjeu aujourd’hui : sortir de la logique du déni

On sait très bien que ce ne sont pas ces petits gestes qui nous sortiront, d’un coup, de la crise écologique. Mais même toute relative, l’efficacité est bien là. Et si nous le faisons avec conviction alors tous ces petits gestes deviendront « une démonstration positive, créative – le plus possible porteuse de joie de vivre – de la possibilité de changer de modes de consommation, d’organisation, de production. […] Démontrer par l’exemple qu’il est possible de faire autrement, c’est sortir de la logique du déni. » Le philosophe Patrick Viveret nous invite par ces mots à « sortir des logiques de panique, [à] mettre en œuvre une intelligence du cœur. » S’appuyant sur Spinoza, il « [met] en évidence ce constat anthropologique fondamental : seule l’énergie de la joie est suffisante pour s’opposer aux émotions engendrées par la peur. »

La joie, la clef du changement

La joie, elle est peut-être là, la clef du changement, autant collectif que personnel. Elle accompagne la réflexion du pape François tout au long son l’encyclique Laudato si’. Du début, « [Saint] François [d’Assises] est l’exemple par excellence de la protection de ce qui est faible et d’une écologie intégrale, vécue avec joie et authenticité. » jusqu’à la fin, « Marchons en chantant ! Que nos luttes et notre préoccupation pour cette planète ne nous enlèvent pas la joie de l’espérance. »

Martin de Lalaubie

 

 

Martin de Lalaubie
Journaliste au Ceras
Réalisateur de Jeunes et engagés

 

 

Les autres billets de Martin de Lalaubie

Voir aussi :
La COP21, ça nous concerne ?
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Végétarienne, c’est possible !
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