Les sentinelles de la société 2/2
C’est ainsi que le P. Christian Venard, aumônier militaire, aime à parler de celles et ceux qui exercent une attention au service de la société de par leur métier. A l’occasion de la sortie de son premier ouvrage : Un prêtre à la guerre nous sommes allés le rencontrer. Ce livre est tout à la fois un récit de sa mission singulière d’aumônier militaire et un hommage aux militaires. En particulier ceux qui ont donné leur vie pour la patrie.
Voir aussi l’interview du p. Christian Venard
Le père Christian Venard est aumônier militaire depuis 1997, à ce titre il a participé à de nombreux théâtres d’opération ou OPEX : Kosovo, Liban, Liban, Côte d’Ivoire et Afghanistan. Être aumônier militaire est loin d’être de tout repos ; pour être considéré comme un vrai para, il faut faire ses preuves et donc passer par l’entrainement comme tous les hommes. L’aumônier partage aussi les mêmes conditions de vie que les soldats, ce qui veut dire parfois se doucher avec du sable quand on est en plein désert…
L’aumônier, comme le prêtre ouvrier, vit avec les hommes qui lui ont été confiés ; mais dans le même temps, il n’est pas un combattant. C’est parfois crucifiant de devoir rester à l’arrière, de ne pas pouvoir être au plus près en permanence. Il faut savoir rester humble, ne pas gêner les manœuvres et s’adapter au contexte de l’intervention. Parfois la providence vous sourit comme lors de la remontée sur Tombouctou au Mali où le colonel demande au “Padre” d’être présent, y compris lors de la prise de l’aéroport en pleine nuit, une occasion d’être au plus près qu’il n’a pas raté !
Le “Padre”, un nom qui montre aussi la place à part de l’aumônier. Quelles que soient ses croyances, on sait qu’on trouvera chez lui une oreille attentive et bienveillante. On peut tout lui dire, tout lui montrer. Il est aussi attendu, en particulier dans les moments douloureux comme la mort d’un camarade. Cette attente est parfois confuse, pas toujours formulée mais quand ça va mal on attend la présence du “Padre”. Le Père livre un témoignage marquant de l’accompagnement de la troupe et des familles lors de l’embuscade de la vallée de la Kapisa où 4 soldats ont trouvé la mort. Ou lors de l’affaire Merah qui a exécuté deux paras sur une place à Montauban alors qu’il était à deux pas de là. Deux paras morts dans les bras du “Padre”.
Cependant l’armée est à l’image de la France. La pratique religieuse n’y est pas plus grande qu’ailleurs, le “Padre” ne compte plus les messes célébrées tout seul. Il y a quand même quelques moments de grâce comme lorsque ce capitaine un jour viendra de lui-même lui demander le baptême, il y songeait depuis longtemps mais attendait la bonne rencontre avec un prêtre. Pour certains, l’OPEX se transforme même en véritable retraite spirituelle : messe tous les jours et un prêtre disponible en permanence.
Résumé de l’éditeur :
Il porte la tenue des soldats, partage leurs repas, leurs soucis. Sa coupe de cheveux est réglementaire. Il a l’allure d’un militaire, un « para ». Comme ses hommes, il effectue des sauts de formation. Mais sa mission est tout autre. Christian Venard, 1,90 m et 82 kg n’est pas un guerrier. Ce colosse à la voix étrangement douce, ce « militaire » que l’on repère derrière le col romain, exerce ce qu’il est impropre d’appeler un métier. Il s’agit d’une vocation. Il est l’aumônier militaire du culte du 17e RPG, le régiment de génie parachutiste de Montauban. Les 800 hommes de la garnison l’appellent le « Padre ». Quatre hommes morts en Afghanistan sur la seule année 2011, 3 autres assassinés le 15 mars par Mohamed Merah sur le trottoir près d’un bar-tabac à 50 mètres de la caserne : « Cette scène n’aurait pas dû être. Je m’y étais préparé pour la vivre auprès des gars en opération, un jour, peut-être, mais pas sur le sol d’un rond-point de ville, entre deux boutiques ». Le « Padre » accompagne humainement les troupes, regarde chaque militaire qu’il croise avec un autre regard, indépendamment de son grade. Il représente pour ses soldats la figure paternelle. Surtout, cet homme d’Eglise est l’interlocuteur privilégié quand le régiment rencontre la mort. Cette mort, il l’a côtoyée dans l’anonymat du combat à des millions de kilomètres en Afghanistan comme sous le feu des projecteurs lors de la tuerie de Montauban opérée par Mohammed Merah l’an passé. Guillaume Zeller nous livre ici le témoignage d’un homme de son temps, les joies et les défis du sacerdoce militaire conscient des grandes problématiques contemporaines et religieuses.
Un prêtre à la guerre. Editions Tallandier. 290 pages. 17€.
Commentaires
A toi la parole.
Il n'y a pas encore de commentaire.