Sortir de la prostitution, du bois de Boulogne à la vie…
Durant l’avent, le JCB, en partenariat avec l’association Aux captifs la libération, vous invite à convertir votre regard sur les plus démunis. Venez les écouter, venez entendre l’histoire de toutes ces personnes qui, comme le Christ petit enfant dans la crèche, sont fragiles et ont besoin d’amour. Au moment où est voté la loi sur la prostitution, Yoko, ancienne prostituée du bois de Boulogne, raconte son histoire.
Comme un cerf-volant
“J’aime bien prendre soin des autres en leur faisant des massages. Je crois que cela me vient de mon grand-père. Quand j’étais petite, il m’a appris la médecine traditionnelle chinoise. Et si nous avons dû fuir le Laos, puis nous avons connu les camps de travaux forcés avant de devenir réfugiés politiques, j’ai gardé cela dans ma mémoire. Ma famille et moi sommes arrivés en France en 1985 à Limoges. Mon père est alors devenu violent car il ne trouvait pas de travail et notre famille n’avait plus une vie aisée ; car dans mon pays, nous avions des terres, nous étions riches. J’ai donc fui à 16 ans les coups de mon père et le foyer familial pour venir, seule, à Paris. J’ai dormi dans le métro, dans les bois. C’était très dur… Ce n’est qu’après ma rencontre avec les Captifs, quand j’ai réussi à quitter le monde de la prostitution que j’ai décidé de devenir masseuse. Cela va faire bientôt trois ans… Je suis enfin dans la lumière. Les Captifs, c’est ma deuxième famille car ils ont été une lumière pour moi. Je leur suis fidèle car cela fait 20 ans que je les connais : bénévoles, travailleurs sociaux. Grâce à eux, j’ai pu quitter la prostitution ; essayer de faire un autre métier, avoir une autre vie comme tout le monde.
Masser les gens, les aider à se sentir mieux, cela me rend heureuse. Quand quelqu’un a moins mal aux mains ou aux pieds après mon massage, je suis heureuse et cela me donne envie de continuer ce nouveau métier qui remplit mes journées. C’est dur pour les transsexuels de trouver un emploi. En plus, s’ils sont malades comme je le suis. Moi, je commence à un peu gagner de l’argent en faisant des massages à domicile ou à « Massages Expo », Porte de Versailles, où j’ai eu un stand durant quelques jours. Mais ce qui compte pour moi, ce n’est pas l’argent, c’est le cœur, c’est rencontrer des gens. Je n’ai donc pas de tarifs imposés, je prends ce que les gens me donnent pour me remercier après les avoir massés. Avec cela, j’arrive enfin à voir l’avenir. Le Bois de Boulogne, c’est vraiment fini ; je n’y vais plus et tant mieux ! Car c’est vraiment dur d’être avec des voyous et de voir l’alcool partout… Mais ce qui me fait mal quand j’y pense, c’est de savoir les autres se faire toujours du mal à eux-mêmes…ils sont prisonniers…c’est comme s’ils vivaient de jour comme de nuit dans le noir. Le Bois, c’est l’argent ; et gagner de l’argent en se prostituant cela détruit ; cela fait honte… L’argent ce n’est que du papier et pourtant ça peut faire brûler les relations, ça peut nous brûler et nous détruire à l’intérieur.
Le plus important, c’est de se rencontrer les uns et les autres ; car on est fait pour aimer, pour comprendre chaque personne : celle qui est généreuse et est gentille comme celle qui ne donne rien et semble fermée, froide.
Mon rêve ? Que tous ceux qui sont encore esclave de la prostitution soient libres ! Qu’ils découvrent la vraie vie ! Mes copines du Bois ont repris courage en me voyant sortir de là ! Maintenant, elles savent qu’on peut vivre ailleurs et commencer un autre métier. J’ai perdu la moitié de mon âge là-bas et j’étais dans le noir, j’aimerais que personne ne vive cela ! En plus de masser, j’apprends aussi la peinture chaque semaine (atelier de l’antenne de Paris Centre ) et j’ai envie que mes tableaux voyagent. Pour que les gens sachent que les prostituées, les transsexuels sont capables de faire du beau. Aujourd’hui, oh la la, qu’est que je me sens bien !!! Comme un cerf-volant… Légère, c’est comme si je volais dans les airs. Et même si je n’ai pas d’argent, c’est pas grave, mon cœur, lui, est bien, apaisé. C’est ma prière à Jésus et à Marie et aussi certaines prières bouddhistes qui m’aident à rester ainsi, dans la lumière. Si je vais sur un bateau, je ne m’enferme pas à l’intérieur ; je reste sur le pont pour regarder les étoiles ; elles me rapprochent du ciel…de Dieu.”
Yoko
Les captifs: L’association Aux captifs, la libération est une association loi 1901, créée en 1981 par le père Patrick Giros et agréée par les pouvoirs publics. Elle a pour vocation de rencontrer et d’accompagner des personnes qui vivent dans la rue ou de la rue.
Elle est implantée sur quatre secteurs parisiens (Paris Centre, Paris 10e, Paris 12e et Paris 16e) et s’est dotée d’un Centre d’Hébergement de Stabilisation en 2010 dans Paris.
Son action s’articule concrètement autour de tournées-rue, de permanences d’accueil où s’effectuent un travail d’écoute approfondi, d’un suivi social et sanitaire, et de programmes de dynamisation. De multiples partenariats sont mis en place ainsi que de nombreuses activités de sensibilisation, d’information, de dialogue et de réflexion.
Des programmes spécifiques ont été également créés afin de répondre directement aux besoins des personnes que nous rencontrons :
lieux d’accueil de jour
accueil pour les jeunes Dauphine Lazare
Espace Solidarité Insertion “Chez M. Vincent”
véhicule de contact “Béthel”
programme “Santé dans la rue”…
Centre d’Hébergement de Stabilisation “Valgiros”
Il s’agit aussi de cerner au mieux les lourdes difficultés de la population rencontrée : exclusion profonde, extrême précarité, asocialité, perte de repères, tendances suicidaires, alcoolisme et toxicomanie, violence, prostitution, pathologies lourdes et variées (VIH, hépatites, tuberculose, MST…), troubles psychiatriques de plus en plus importants.
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