« Stromae et le pape François, même combat ! »
Le chanteur Stromae, 29 ans, a triomphé aux 29èmes Victoires de la musique vendredi 14 février en emportant la Victoire de l’artiste masculin de l’année et celle de l’album de chansons pour Racine carré ainsi que celle du clip pour Formidable. Retour sur ce chanteur hors-pair avec le père Manuel Grandin s.j., directeur du Réseau jeunesse ignatien (RJI).
Pourquoi Stromae fascine-t-il autant ?
Le fait d’avoir son style à lui, très personnel, touche les gens. Il est inclassable et cultive sa différence tout en restant totalement lui-même, loin du formalisme imposé par le star system. Et sa musique bien sûr, aux multiples influences (électro, slam, rap) a beaucoup attiré par ses refrains faciles à retenir. On l’écoute à la fois pour ses paroles aux sujets graves, (le cancer, les violences conjugales, etc.) et à la fois pour danser. Rassembler ces deux critères est plutôt rare.
Il est aimé pour son style et sa personnalité ou pour sa musique ?
Les deux ! Une musique est toujours incarnée, c’est certain que le charisme de l’interprète joue énormément. Stromae a compris l’importance de la communication et y travaille. Si je peux oser la comparaison, comme le pape François, il a compris que le message ne suffit pas, encore faut-il l’incarner pour le transmettre. Stromae et le pape François, même combat (rires) ! D’ailleurs, les disciples à l’époque, ils n’ont pas suivi des idées, ils ont suivi Jésus, un être incarné.
Que pensez-vous du clip « House’llelujah » où il se met en scène tel un gourou ?
Son message, pour moi, à travers ce clip, est « N’instrumentalisez pas Dieu ». Il joue beaucoup sur les images. « J’ai prié Dieu mais à quel saint je dois me vouer », semblerait-il dire. Tout le monde s’approprie ‘Dieu’ à sa manière mais de quel Dieu parlons-nous ? Quelle(s) image(s) avons-nous de Dieu ? Stromae sans cesse déconstruit les pensées préconçues pour sortir de l’idéologie et de l’idolâtrie. Il encourage à ne pas prendre pour argent comptant ce que la société propose mais à exercer un esprit critique en se fondant par ailleurs sur certaines valeurs, comme la famille, qui est primordiale pour lui.
Pouvons-nous voir un message évangélique à travers les chansons de Stromae ?
En parlant des réalités difficiles que chacun peut être amené à vivre, le cancer, la violence conjugale, etc. avec des choix musicaux joyeux et entrainants, il semble dire : oui la réalité est difficile mais ce n’est pas la fin ! En tant que chrétiens, nous pouvons y lire une invitation à regarder le réel sans le fuir, avec lucidité, mais sans jamais désespérer ni de Dieu, ni du monde, ni de nous-mêmes.
Son côté provoquant, voire dérangeant est-il vendeur ?
Quand il fait le clip Formidable ou quand il refuse d’aller aux Enfoirés, il n’hésite pas à prendre des risques mais surtout il assume ce qu’il est, toujours avec beaucoup de respect et d’humilité. Il construit son propre monde et se construit lui-même, tout en gardant sa liberté face au star system ou aux exigences extérieures. Les gens sont attirés par cette liberté, car eux-mêmes y aspirent. Sa force, c’est son indépendance (son producteur, son directeur artistique, son photographe étant tous des proches dans sa famille). Et comme il l’a rappelé à la presse « On ne fait pas de la musique pour le succès ». Il fait de la musique avant tout pour lui-même, il s’amuse beaucoup, il fait des grimaces, il prend plaisir ! Il suit sa route. Je lui souhaite qu’elle continue longtemps avec autant de talent et d’intégrité !
Propos recueillis par Marie Benêteau
Voir aussi :
La prestation de Stromae aux 29èmes Victoires de la musique
Rubrique “Culture et médias” sur Jeunes Cathos blog
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A toi la parole.
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