A la découverte des chrétiens de Palestine
Après sa nuit au Saint Sépulcre, Charles nous entraine à Deir Rafat dans le sanctuaire de Notre-Dame Reine de Palestine. Le jour de sa solennité est pour beaucoup de fidèles palestiniens l’occasion unique dans l’année de traverser le mur qui sépare les territoires palestiniens où ils habitent en majorité et Israël où se trouve le sanctuaire.
C’est sous le regard bienveillant de Notre-Dame Reine de Palestine que je voudrais poursuivre cette modeste chronique, afin qu’elle nous guide sûrement sur le chemin qui mène de « la Jérusalem terrestre aux splendeurs de la Jérusalem céleste » !
La Solennité de la Regina Palestinae est célébrée avec éclat le dernier dimanche d’octobre dans son sanctuaire de Deir Rafat, au pied des monts de Judée, au sud de la route qui mène de Jérusalem à Tel Aviv. Pour beaucoup de fidèles palestiniens c’est l’occasion unique dans l’année de traverser le mur qui sépare les territoires palestiniens où ils habitent en majorité et Israël où se trouve le sanctuaire. Cette fête est marquée par la joie des retrouvailles des nombreuses familles que cette frontière sépare.
Une petite route monte jusqu’au sommet de la charmante colline d’où le sanctuaire domine le waddi planté de vignes et d’oliviers. Quelques scouts arabes accueillent les pèlerins dans leur plus belle tenue d’apparat et distribuent généreusement bouteilles d’eau pour affronter la chaleur du jour et une feuille de chant que je prends mécaniquement avant de me rendre compte que la typographie arabe m’est encore trop étrangère pour lire les paroles en chantant. Quelques échos de mélodies orientales nous mènent jusqu’à la grande esplanade où la messe sera célébrée. Un groupe de prêtres et séminaristes du séminaire latin de Beit Jala s’y adonnent généreusement à la louange, entraînant à leur suite les centaines de fidèles déjà installés sous la grande toile qui a été tendue pour protéger du soleil encore brûlant en ce dernier dimanche d’octobre.
Le temps de faire le tour du sanctuaire, tout décoré de drapeaux du Vatican en ce jour de fête, et la messe commence, avec le concours de centaines de fidèles, dizaines de prêtres et séminaristes et quelques évêques. En l’absence du patriarche Fouad parti prier pour la paix à Assise, c’est le Nonce qui préside. Il ne maîtrise pas parfaitement l’arabe, qu’importe ! Il est courant ici, dans la vie de tous les jours comme dans la célébration de la messe, de changer de langue entre deux phrases. C’est une dizaine de langues qui seront employées au cours de la messe, dont le français, dans une atmosphère qui n’est pas loin de rappeler celle des JMJ. Heureusement pour moi, c’est en anglais que le nonce prêche : « Like a mother calling her child who plays in the garden to join her, the Virgin Mary is the mother who reminds us that we need to return to Jesus and the Church. » Parmi les nombreuses langues employées, je suis touché par l’habitude qu’ont les chrétiens de ce pays de prier en latin, langue qui leur est nettement plus étrangère qu’elle ne l’est pour nous, manifestant ainsi leur attachement à l’Eglise de Rome et leur conscience d’être eux-mêmes des latins.
Après la lecture d’un message dans lequel le Pape François annonce que la journée internationale des malades aura lieu en 2015 à Nazareth, nous partons en procession derrière la belle statue de Notre-Dame Reine de Palestine. Celle-ci étend largement un bras comme pour bénir, et les fidèles se pressent pour s’y blottir à la fin de la procession, et pour y être pris en photo. Certains détachent même des fleurs, feuilles ou tiges du bouquet qui l’orne, emportant avec eux ces rameaux de Notre-Dame. Après la bénédiction, à l’heure où chacun rejoint son groupe, j’ai la joie de croiser une amie parisienne venue effectuer ici une année de discernement chez les sœurs de Bethléem. Entourée d’autres postulantes et de sœurs, je suis émerveillé par la vie authentique qui transparaît des paroles toutes simples qu’elles me disent. Elles repartent bien vite servir le repas de fête apprêté pour les prêtres venus pour l’occasion, et je pars marcher avec quelques amis dans le waddi.
Nous empruntons une belle piste de terre ocre bordée de champs presque roux, de rangées de vignes, d’oliviers et d’amandiers. Nous abandonnons bien vite le projet de nous baigner dans les étangs artificiels créés pour l’irrigation : ils sont entourés de clôtures, d’inscriptions hébraïques illisibles, de têtes de mort, mais surtout ils empestent ! Après une belle pause pour le déjeuner et quelques heures de marche, nous rentrons au sanctuaire. Nous retrouvons alors les sœurs courant et rangeant à tout va qui nous tombent dessus… pour les aider à finir les restes. Il n’est que 5h du soir, mais il fait déjà nuit à cette heure depuis le passage à l’heure d’hiver, et nous acceptons donc cette délicate invitation. Après quelques plats de choux, de semoule et d’houmous, voilà que chacun se met à chanter et c’est une heure incroyable que nous passons avec une petite dizaine de ces sœurs à nous écouter chanter à tour de rôle les chants et cantiques que nous aimons. Quelle est l’admirable simplicité qui permet à ces sœurs d’ordinaire plongées dans la solitude de comprendre la grâce de cet instant qui les arrache au silence ? J’en suis encore tout émerveillé.
Jérusalem, novembre 2013
CMD.
Retrouvez ici notre chronique de Terre Sainte
Un récit de la journée sur le site du patriarcat latin de Jérusalem
Commentaires
A toi la parole.
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