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La Résurrection du Christ au cinéma

Publié par jeunescathos le 20 mai 2016 - A la Une, Culture & Médias

Sorti le 4 mai dernier, le film La Résurrection du Christ revient à travers le regard d’un païen sur cet événement qui a changé l’humanité . Marc Rastoin s.j. nous en livre quelques clefs.

Mettre en scène l’Evangile ?

Il est toujours difficile de mettre en scène les récits évangéliques : à la fois chaque évangéliste fait ses propres choix théologiques et littéraires (le scénario de la Passion et les épisodes après la Résurrection sont différents selon chaque évangile) et d’autre part, les évangiles cherchent à mettre en mots une expérience spirituelle particulièrement délicate à rendre à l’écran.

Le scénariste Paul Aiello a fait un travail remarquable en évitant deux pièges : il ne prétend pas retranscrire les évangiles, comme l’avait fait Mel Gibson avec The Passion of the Christ : il assume sa part de création, en imaginant un voyage prévu de l’Empereur en Judée. Ensuite, il a justement choisi de ne pas filmer la Résurrection elle-même, piège dans lequel Mel était tombé. Le moment de la Résurrection est raconté par un témoin, un des gardes, selon la version de saint Matthieu. C’est un choix légitime.

Clavius, tribun romain, cherche la dépouille du Christ avec les apôtres. Il Le voit ressuscité.  Copyright 2016 Sony Pictures Releasing GmbH

Clavius, tribun romain, cherche la dépouille du Christ avec les apôtres. Il Le voit ressuscité. Copyright 2016 Sony Pictures Releasing GmbH

« Il vit, et il crut. » (Jean 20, 8)

L’idée de base du scénario, assez classique (cf. l’Evangile selon Pilate de Eric-Emmanuel Schmitt), est de partir du regard d’un tribun romain Clavius, extérieur au monde juif et ne connaissant pas la tradition juive. Nous suivons cet homme chargé d’enquêter sur la façon dont le corps de ce Yeshua aurait pu disparaître. Les dialogues sont nerveux, efficaces et souvent… drôles. J’ai été très surpris au départ par cet aspect. Certains critiqueront peut-être cette dimension comique : je l’ai, au bout du compte, trouvée originale et évitant le risque de sur-dramatiser. Par ailleurs, il n’y a aucune grande tirade et c’est très bien !

En pratique, la première heure (clairement la meilleure) suit fidèlement saint Matthieu (l’argent et les gardes, le tremblement de terre, etc.). Nous avons ensuite une séquence avec saint Jean avant de conclure avec saint Luc et sa célèbre Ascension. Pour bien montrer qu’il fait œuvre personnelle, le scénariste a ajouté l’un ou l’autre élément clairement inventé (l’arrivée prochaine de l’Empereur, un miracle effectué après la Résurrection) ou fait des choix ‘romanesques’ (Marie de Magdala connue comme ‘femme de la rue’ à Jérusalem et la poursuite, assez ridicule, des disciples par les Romains en Galilée) mais l’ensemble est quand même plutôt fidèle aux évangiles.

Des acteurs crédibles

Les acteurs sont bons avec une mention spéciale à Joseph Fiennes, crédible. Pilate et Marie-Madeleine sont bien aussi ainsi que… Jésus (c’est une des premières fois que je vois un Jésus que je trouve physiquement crédible !). L’acteur n’en fait pas des tonnes et se contente d’être serein et souriant. Le film reconstitue bien l’époque et la tension qui règne dans la ville de Jérusalem et sur la terre d’Israël. Il est attentif à ne pas trop en faire avec les autorités du Temple. Il suit Matthieu en soulignant que ce sont les chefs des prêtres qui mènent l’accusation mais il n’y a pas de parti-pris anti-juif dans le film et cela mérite d’être souligné. Le film rend bien le trouble et l’agitation vécus par les disciples en ces jours de la Passion. Les Apôtres ont été pris dans un maelstrom de sensations, de questions, tentés par la joie mais aussi parfois saisis par la peur. Cela nous déloge de nos reconstitutions mentales un peu trop sages et c’est bien.

« Parce que tu m’as vu, tu crois. Heureux ceux qui croient sans avoir vu. » (Jean 20, 29)

Le Caravage, L'incrédulité de Thomas, 1603, huile sur toile, Palais de Sanssouci, Postdam, Allemagne

Le Caravage, L’incrédulité de Thomas, 1603, huile sur toile, Palais de Sanssouci, Postdam, Allemagne

Au plan théologique, une dimension intéressante est mise en valeur : la question du rapport de la foi et de la certitude.

Elle met en valeur deux questions : peut-on ‘voir’ Jésus ressuscité si l’on n’a pas connu son enseignement et ses signes de puissance ? Bref, qu’aurait ‘vu’ quelqu’un qui serait entré par hasard dans la pièce du cénacle où Jésus et les Douze sont réunis ? On comprend que voir et croire sont sur deux plans. Parce que l’on peut très bien ‘voir’ quelqu’un mais continuer à se dire : ‘Mais c’est quoi le truc ?’ Bref ‘voir’ sans ‘croire’.

Le deuxième aspect est que la foi ne supprime pas les questions : il y a une belle scène assez originale avec Simon-Pierre sur ce point (« Mais je ne sais pas ! »).

Bref, dans ce genre hautement balisé et où les pièges sont nombreux, le résultat n’est pas à dédaigner. Ce film, qui n’est certainement pas sans défauts, peut déshabituer nos regards et nous amener à ‘réaliser’ à nouveau le choc absolu que fut ‘la Résurrection’. Il pourra être utile pour introduire un débat sur la Résurrection et les questions de théologie qu’elle pose.

Marc Rastoin

 

 

 

Marc Rastoin s.j.

 

 

 

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