14 juillet : honneur aux sentinelles de la société !
C’est ainsi que le Père Christian Venard, aumônier militaire, aime parler de tous ceux qui, par leur métier, exercent une attention au service de la société. Nous l’avions rencontré il y a quelques années à l’occasion de la sortie de son premier ouvrage, Un prêtre à la guerre. Que signifie être militaire ? Comment être chrétien dans l’armée ? Le Padre vous répond.
Père Christian Venard : “Les militaires veulent avant tout servir leur pays et ses citoyens. L’homme du rang qui s’engage ne l’exprime pas toujours immédiatement. Il vient car il veut une deuxième chance. Parce qu’il ne trouve pas de travail. L’armée forme ces hommes du rang, et leur fait prendre conscience de leur rôle, de ce qu’ils doivent à leur pays. Le jeune Saint-Cyrien a davantage cette reconnaissance envers son pays, on va donc plus lui apprendre à épurer cet idéal.
Un Chrétien dans l’armée expérimente de manière plus particulière une tension que nous connaissons tous entre ce commandement biblique : « Honore ton père et ta mère »Ex 20,4, et cette parole de Jésus « Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi, n’est pas digne de moi » Mt 10, 37. Tout baptisé a deux patries : sa patrie définitive est le Royaume des Cieux. Ce royaume commence dès ici bas, nous participons à son édification. Pour autant, les baptisés ne sont pas des universalistes qui voudraient abolir les cultures: ils honorent la terre de leurs pères, cette patrie à qui ils doivent l’éducation, la culture qu’ils ont reçues.
Il ne faut cependant pas confondre patriotisme et nationalisme. Le second relève plus de l’idéologie tandis que le premier se réfère à notre histoire, notre culture, avec ses qualités et ses zones d’ombre. Ma patrie, je dois l’aimer telle qu’elle est. Les premiers chrétiens, par exemple, ne se sont pas faits persécuter directement à cause de leur foi dans le Christ, mais parce qu’ils mettaient le Christ au-dessus de la nation romaine en refusant d’adorer l’empereur. Les Etats totalitaire essayent également d’annihiler cette conscience humaine qui met l’homme, notamment le Christ, au-dessus de l’Etat. La réalisation de leur idéologie ne peut s’en accommoder. En ce sens, la déclaration de Vatican II sur la liberté religieuse est prophétique !
L’engagement militaire nous met au service de notre pays mais il expose à deux risques : être tué, mais aussi être obligé de tuer. Tuer un ennemi n’est pas anodin. Il est vrai que le premier mouvement d’un soldat est de trouver son ennemi épouvantable, parce qu’il menace notre pays, ou qu’il a tué nos camarades… Ce premier mouvement doit faire place à la parole du Christ qui me demande d’aimer même mes ennemis. Après un coup dur, on prie pour ceux qui sont blessés ou morts, mais aussi pour nos ennemis. Se rendre compte qu’en face de nous il y a des hommes nous permet de rester humains, et de ne pas sombrer dans la barbarie. Un officier en Afghanistan me faisait part de son horreur face à ce qu’il voyait : « Padre, c’est le summum de la violence, c’est la violence pour la violence ». Son âme de chrétien en était meurtrie. L’âme humaine porte douloureusement cette transgression : « j’ai vu la mort, j’ai tué ».
Pour éviter les dérives, il est nécessaire de prendre conscience des valeurs que l’on veut porter et des raisons de notre action. Même si on obéit à la hiérarchie. Le soldat les intègre parfois inconsciemment, mais plus on monte dans la hiérarchie, plus cette prise de conscience doit être importante. La foi joue alors un rôle central. L’aumônier est là pour susciter cette réflexion. Il m’est d’ailleurs souvent arrivé que des officiers, après une réunion où ils m’avaient demandé d’assister, me demandent mon avis sur la justesse des décisions prises.”
Résumé de l’éditeur : Un prêtre à la guerre. Editions Tallandier. 290 pages. 17€.
Il porte la tenue des soldats, partage leurs repas, leurs soucis. Sa coupe de cheveux est réglementaire. Il a l’allure d’un militaire, un « para ». Comme ses hommes, il effectue des sauts de formation. Mais sa mission est tout autre. Christian Venard, 1,90 m et 82 kg n’est pas un guerrier. Ce colosse à la voix étrangement douce, ce « militaire » que l’on repère derrière le col romain, exerce ce qu’il est impropre d’appeler un métier. Il s’agit d’une vocation. Il est l’aumônier militaire du culte du 17e RPG, le régiment de génie parachutiste de Montauban. Les 800 hommes de la garnison l’appellent le « Padre ». Quatre hommes morts en Afghanistan sur la seule année 2011, 3 autres assassinés le 15 mars par Mohamed Merah sur le trottoir près d’un bar-tabac à 50 mètres de la caserne : « Cette scène n’aurait pas dû être. Je m’y étais préparé pour la vivre auprès des gars en opération, un jour, peut-être, mais pas sur le sol d’un rond-point de ville, entre deux boutiques ». Le « Padre » accompagne humainement les troupes, regarde chaque militaire qu’il croise avec un autre regard, indépendamment de son grade. Il représente pour ses soldats la figure paternelle. Surtout, cet homme d’Eglise est l’interlocuteur privilégié quand le régiment rencontre la mort. Cette mort, il l’a côtoyée dans l’anonymat du combat à des millions de kilomètres en Afghanistan comme sous le feu des projecteurs lors de la tuerie de Montauban opérée par Mohammed Merah l’an passé. Guillaume Zeller nous livre ici le témoignage d’un homme de son temps, les joies et les défis du sacerdoce militaire conscient des grandes problématiques contemporaines et religieuses.
Commentaires
A toi la parole.
Merci pour ces explications sur la présence de l’aumonier militaire sur le front, car je présume qu’il s’agit d’un vrai sacerdoce ou il faut faire la part des choses militaires et religieuses ou la réflexion consciente doit faire place à l’automatisme de la vie et de la préparation militaire et surtout de la guerre , de l’horreur savoir trouver les mots pour réconforter et non juger les belligérants quelle que soit leur religion , j’aime beaucoup la difference en patriotisme et nationalisme