La vie communautaire
Marlene, dans ce nouvel épisode du Journal d’une jeune religieuse, nous partage comment elle envisage la vie communautaire, en partant des Actes des Apôtres.
Dans ma vie quotidienne, les récits des Actes des Apôtres m’encouragent beaucoup pour m’engager concrètement et résolument vers plus d’ouverture avec mes sœurs, dans la vie communautaire, mais aussi avec tous ceux que je rencontre dans mes allers et venues, dans les rues, au travail, dans le métro.
La foi ne se vit pas seul
Les Actes, pour moi, se font l’écho du passage de la foi un peu exclusive en la personne du Christ à une foi communautaire, une foi vécue, portée et transmise ensemble.
C’est ce que vivent les disciples après la mort et la résurrection du Christ : enfermés à Jérusalem, ils sont invités à ce passage, à cette conversion pour un retour vers la communauté. Car désormais, c’est par eux que passe la foi en Jésus-Christ. Par eux, mais aujourd’hui aussi par moi, par nous tous ! C’est aussi ce qui nous est donné de vivre dans la liturgie après Pâques, les textes nous invitent à faire ce passage. « De cela vous êtes témoins », avait dit le Ressuscité.
« C’est une vraie aventure ! »
Avant mon entrée dans la communauté religieuse, de l’extérieur, je percevais le rythme de vie communautaire souvent comme lassant, répétitif, ennuyeux même. Or, en lisant les Actes des Apôtres, le récit des premières communautés chrétiennes naissantes, une des impressions frappantes est, qu’être chrétien avec d’autres peut vouloir signifier tout sauf l’ennui ! C’est une vraie aventure !
« Faire avec » – pour une vie fraternelle
Après quelques années de vie communautaire, mon regard sur ce quotidien a beaucoup changé et évolué : au début j’ai pensé, qu’il fallait surtout apporter, donner et faire beaucoup POUR les autres, ce qui n’est pas tout à fait faux non plus. Mais petit à petit, on apprend à dire l’un à l’autre, comme Pierre et Jean à l’infirme de la Belle Porte : « Regarde-nous ! » De l’argent et de l’or, des talents et des capacités, des diplômes et des grades, je n’en ai pas. Alors c’était un vrai déclic pour moi : Ce n’est pas le faire, l’effort qui compte, ni l’avoir, mais le fait d’ETRE AVEC. De me laisser aimer et relever, de recevoir la vie fraternelle, et la foi ENSEMBLE dans le souffle du même don, et de la transmettre : « Ce que j’ai, je te le donne : au nom de Jésus Christ le Nazaréen, lève-toi et marche » (Ac 3).
Pierre et Jean me donnent un modèle extraordinaire pour mes difficultés quotidiennes du « vivre-ensemble »
– Ils sont envoyés ensemble – contre l’individualisme et l’autosuffisance
– Dieu les attend aussi ailleurs que dans la prière – contre le légalisme et le ritualisme
– Ils ne cachent pas leurs propres fragilités et leur manque– contre la vanité et le perfectionnisme
– Ils révèlent en toute transparence et simplicité qu’ils agissent au nom de Jésus Christ – contre l’ostentation de notre propre gloire
Le Seigneur, Celui qui nous rassemble
Pour qui suis-je là, donnée au Seigneur, au sein d’une communauté de l’Église, aujourd’hui ? Quel nom nous rassemble et agit dans notre vie fraternelle, liturgique, apostolique, dans nos services et responsabilités ? Cette question m’aide tous les jours à remettre le nom de Jésus Christ au cœur de ma vie, au cœur de mes engagements.
Est-ce que je ne suis pas souvent en train de cacher mes points faibles, mes pauvretés, ma vulnérabilité, pour montrer aux autres (et au Seigneur…) uniquement mon côté convenable ? « Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? » (1 Co 4,7)
« C’est à l’amour que vous avez les uns pour les autres, qu’on reconnaitra que vous êtes mes disciples »
Dans la vie communautaire, cette expérience de la foi commune, du « vivre-ensemble », du regard de l’autre qui me met debout, qui me relève et m’apprend à avoir confiance, est une vraie grâce, une école d’humilité et l’apprentissage de l’accueil de la différence de l’autre, du Tout-Autre aussi.
Avec une vraie joie profonde, j’apprends sans cesse (ce n’est jamais fini !) que lorsque je crois pouvoir avancer mieux ou plus vite en travaillant ou en priant seul, ce n’est pas là l’efficacité suprême aux yeux de Dieu. Et que quand c’est moi, aux jours plus difficiles, qui suis plus faible, traversant une épreuve, étant la brebis perdue ou blessée, j’expérimente en direct la douce et patiente miséricorde qui m’est offerte par mes frères et sœurs, comme la main de Dieu qui me relève et m’offre un « à-venir ».
Car « c’est à l’amour que vous avez les uns pour les autres, qu’on reconnaitra que vous êtes mes disciples », dit Jésus.
Personne ne peut être chrétien tout seul. Au ciel, on y va ensemble, et peut-être les premiers auront à attendre les derniers.
Marlene Scheuerer est moniale aux Fraternités Monastiques de Jérusalem
Voir aussi :
L’appel : pourquoi moi ?
Le Carême, le temps du désir
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A toi la parole.
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